Fondation
Émile-Nelligan

Maude Smith Gagnon

Lauréate du prix Émile-Nelligan

Maude Smith Gagnon,
Une tonne d’air,
Triptyque
2006

 

 

Maude Smith Gagnon est née sur la Basse-Côte-Nord en 1980. Elle poursuit des études doctorales à l’UQÀM où elle s’intéresse à l’embarras dans lequel nous place l’expérience de la monotonie. Elle a complété, à la même université, une maîtrise qui lui a valu le prix HMH du meilleur mémoire en création (2005). Une tonne d’air est son premier recueil de poésie. Elle travaille actuellement à un projet de correspondance.

Commentaire du jury, par Louise Warren, présidente.

Dans le premier recueil de poésie de Maude Smith Gagnon, Une tonne d’air, l’écriture est à la fois savante, sensible, intense et constante dans sa justesse et sa retenue. La poète donne à vivre une étonnante expérience de la nature, de la matière, du temps végétal, minéral, animal. Le poème se développe dans une micro-écriture et avance dans une lenteur pure. Anatomie du paysage :

Calé au fond d’un lac, le bois mort se décompose lentement. Les particules qui s’en détachent rendent l’eau visqueuse, lui donnent presque une épaisseur.

On imagine un monde de silence. Certaines espèces sous-marines captent pourtant le glissement des troncs sur le lit pierreux, les sentiers d’air, le grattement ramolli des écorces, les murmures de la vase.

Le vent se lève. Des branches peignent la surface.

Une poésie de l’écoute qui permet la multiplication des points de vue et ce, par les insectes, les plantes, les oiseaux, la terre. Foisonnement des expériences de perception, mais aussi épreuve de l’indifférence, de l’impersonnel, du dehors. Sous ce regard neuf, l’humain se réduit à des traces, l’humain est un événement de la matière. Cette poésie rare s’exclut de la psychologie des émotions, de l’histoire personnelle. Cet art de l’instant fait parfois des clins d’œil aux haïkus, de façon combien fine.

Grattements, bruits de succion : trois fourmis s’affolent autour d’un fruit sec.

À la fragilité du monde correspond la fragilité de l’œuvre et cette adéquation entre le propos et le processus est tout simplement parfaite.

Finaliste du prix Émile Nelligan

Georgette LeBlanc,
Alma,
Les Éditions Perce-Neige
2006

Rosalie Lessard,
La chair est un refuge plus poignant que l’espace,
Écrits des Forges
2006

Georgette LeBlanc est native de Chicaben, en Nouvelle-Écosse. Danseuse et comédienne, elle invente depuis plusieurs années une poésie du corps. Passionnée des histoires et de l’expérience acadiennes et cadiennes, elle termine un doctorat en études francophones à l’Université de la Louisiane à Lafayette. Elle vit en Louisiane et en Nouvelle-Écosse. Alma est son premier recueil de poésie.

Commentaire du jury 

Une écriture avec son accent : telle est la merveille. Un festin acadien et de Baie-Sainte-Marie, pas moins. Pour Georgette LeBlanc, ce n’est pas qu’une question de langue, mais de poésie narrative qui atteint le mythique. Une histoire, dont on sait qu’elle est multiple, contée avec précision dans une belle incarnation, une sensibilité forte, des images justes :

dans un silence qui mire la noirceur mais qui y arrivera jamais dans un silence qui ralentit

Ce poème qui commence dans la matière de la brume se termine avec l’épaisseur de la terre retrouvée. Cette épaisseur-là est aussi celle du texte profond, cohérent, authentique.

Rosalie Lessard est née à Baie-Comeau en 1981. En 2006, elle remporte le Prix littéraire Radio-Canada pour Petit guide des volcans d’Amérique. Elle complète cette année une maîtrise à l’Université de Montréal tout en enseignant la littérature au Collège Jean-de-Brébeuf. Son second recueil, La chair est un refuge plus poignant que l’espace, est paru à l’automne 2006 aux Écrits des Forges.

Commentaire du jury 

Bien scandés, les vers découpent le désarroi, le vide inévitable. Rosalie Lessard écrit :

sous une pluie de cendres je fais bon usage du vide

Un recueil bien construit de la rencontre amoureuse, du sortir de la chambre vers la ville, jusqu’à l’écartèlement, la séparation et la survie, puis la confrontation au monde, dans ses tragédies et ses saccages, et peut-être l’espoir.

je m’absente
je n’ouvre pas les bras recroquevillée à l’intérieur de mes yeux pour ne pas me perdre en même temps que toi

Il y a partout de tels moments de vérité qui nous disent que cette poésie est un travail de conscience, un outil vers la lucidité.

JURY 2006       COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Fondation
Émile-Nelligan

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